Petit cross-over avec Paradise Kiss de Ai Yazawa.
Bonne lecture !
Demande de Black-cherry8
91- Japon & Espagne – Conte de fée.
Kiku était en contemplation depuis bientôt une heure. La vitrine devant laquelle il s'était arrêté ne différait pas tant que ça des autres, si ce n'était son contenu.
Au milieu de deux mannequins nus, un troisième toisait les passants de toute sa majesté, leur donnant, telle une faveur, la possibilité d'admirer une robe dont la coupe et le tissu semblaient sortir d'un rêve.
-Tu peux entrer, tu sais.
Sursautant, il se tourna en direction de la voix qui appartenait à un jeune homme blond qui semblait être sorti pour fumer, au vu de la cigarette entre ses doigts.
-Euh… je ne veux pas déranger, balbutia-t-il.
-Les autres n'y verront aucun inconvénient, j'en suis sûr, viens ! L'invita-t-il.
Il finit par l'attraper par le poignet et le traîna à l'intérieur, sa clope glissée à l'oreille comme un crayon, reléguant son envie de tabac à plus tard.
-Hé, les gars, j'ai croisé un admirateur !
Son accent hachait le japonais, mais ce fut pire encore lorsque l'autre homme présent prit la parole à son tour.
-Hé, mais, je t'ai déjà vu ! Tu viens souvent, non ?
Au lieu de lui répondre, l'étudiant garda les yeux fixés sur les cheveux blancs de son interlocuteur, partagé entre l'envie de partir, persuadé que c'était un voyou, et celle de profiter de l'occasion.
-Je te vois presque collé à la vitre ! Ajouta l'inconnu avant de ricaner.
-Retourne travailler Gilbert, râla une autre voix.
Du fond de l'atelier, un autre homme avait surgi, un coussin à aiguilles enserrant son poignet et un mètre-ruban reposant sur son épaule. Il avait à la main un morceau de tissu sur lequel des annotations à la craie étaient visibles.
-Ton patron ne va pas avancer tout seul !
-Regarde Tonio ! S'exclama le blond de tantôt en attrapant Kiku par les épaules, le faisant sursauter. On a un admirateur, c'est fantastique, non ?
Ledit Tonio lui jeta à peine un regard avant de reprendre ses reproches auprès du troisième membre, le traînant presque derrière lui, les faisant disparaître dans l'obscurité menant sans doute à d'autres pièces.
-Ça s'est plutôt bien passé, déclara le blond en souriant.
Kiku le fixa comme si il était fou.
Finalement -et sous les suppliques de Francis- Kiku revint de nombreuses fois, presque tous les jours.
Il avait appris le nom des trois non-natifs -Francis, Gilbert et Antonio- et la raison de leur présence au Japon -ils y suivaient des études de mode.
Il avait même fini par avouer être totalement sous le charme de leurs créations bien qu'il refuse de le répéter malgré les tentatives de Francis et Gilbert qui le taquinèrent à de nombreuses reprises.
Si ces deux-là étaient bon-enfant et avaient la plaisanterie facile, il en était tout autrement du troisième comparse qui gardait souvent grise mine et fuyait leur bruyante compagnie en faveur de l'atelier aménagé, véritable caverne d'Ali Baba regorgeant de tissus divers d'ornements, de fils, de rubans… De tout ce qui se rapprochait de l'art du vêtement en somme.
Une fois, le Japonais avait pénétré le sanctuaire. Il en était sorti bien vite et ses nuits furent peuplées par le regard noir qui lui avait été lancé cette fois-là. Il n'avait plus recommencé depuis.
Mais il aimait ce lieu, ces heures volées à l'école ou au soutien scolaire, où il les regardait travailler, partageant leurs rires et leurs jurons.
Les voir assembler les tissus, coudre des perles et broder des motifs le ravissait sans savoir pourquoi. Ce n'était pas un univers qui l'attirait plus que ça mais, sous les doigts de Francis et dans les yeux de Gilbert, il avait l'impression de découvrir un monde féerique, loin de l'oppression de la société et des attentes familiales.
Seule la présence -rare- d'Antonio tempérait ses élans romantiques et lui remettait les pieds sur terre.
Dès qu'il était là, à côté de lui ou dans la même pièce, il se raidissait, balbutiait des paroles incohérentes et se ridiculisait de la façon la plus stupide, généralement.
Bref, il était incapable de se mettre en valeur et était une source d'amusement pour les deux autres présents qui le taquinaient le reste du temps.
-Tu sais, on peut t'aider, proposa un jour le blond.
Kiku l'avait accompagné lors de sa pause cigarette et il tentait d'éviter les bouffées de tabac qu'il lui recrachait presque au visage.
-M'aider ? À quoi ?
-Bah, avec Tonio, bien sûr ! s'exclama-t-il joyeusement.
Cette fois, il n'évita pas la fumée et se retrouva à tousser.
-À quoi ? À faire disparaître mon corps quand il aura fini ? Couina Kiku.
-Mais non, voyons !
Son rire cristallin n'apaisa pas l'étudiant. Bien au contraire.
-T'aider à charmer notre grand couturier ! Il est temps que vous arrêtez de vous tourner autour, vous êtes trop grands pour ça. Je te verrais bien avec un costume cintré, une chemise bleu clair…
Espérant oublier, Kiku lui vola sa clope et aspira bruyamment une taffe.
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